Parler du tabac à partir de quel âge?

Le fait de vouloir éviter le sujet de la consommation de tabac afin d’éviter les conflits n’apporte rien. Les enfants et les jeunes ont besoin que les adultes réagissent à leurs questions et problèmes. Vous pouvez leur transmettre des informations sur les risques du tabagisme et les bénéfices d’une vie sans tabac.

La question du tabac peut être discutée à partir de 8 ou 9 ans. Ce qui compte avant tout, c’est d’avoir une attitude ouverte. Cela permet de faire comprendre aux jeunes que vous êtes prêt à en parler avec eux s’ils le souhaitent.

Il n’existe pas de recette miracle, mais il est conseillé d’aborder le sujet du tabac avant l’éventuelle première consommation. Le contenu de la discussion doit être adapté à l’âge de l’enfant :

  • Avant 13 ans, les enfants ont tendance à diaboliser le tabac, avec tous les attributs du «mauvais» («ça sent mauvais et c’est pas bon pour la santé»). Ils peuvent poser beaucoup de questions. Il s’agit de les aider à trouver des réponses et de les sensibiliser aux effets néfastes du tabac. L’enfance constitue la période propice pour poser des jalons et ancrer profondément les comportements non-tabagiques des jeunes.
  • Au-delà de 13 ans (et plus ils grandissent), les jeunes se forgent une identité propre. L’adolescence est une période d’expérimentation des comportements adultes (fumer pour se sentir «adulte»). La prise de risque est associée à ces expérimentations. Dans ce cas, il convient d’engager le dialogue avec les jeunes en valorisant le fait d’être non-fumeur et d’encourager leur esprit critique ; notamment sur les manipulations de l’industrie du tabac.

Aborder la question du tabac de quelle manière ?

Comment parler du tabac avec les jeunes ? Découvrez quelques conseils en cliquant sur la vidéo ci-dessous.

Une information ou un conseil donné de manière inadéquate peut provoquer des résistances de la part du jeune et le résultat peut être à l’opposé de l’effet attendu. Voici quelques pistes pour éviter ce type de situation:

  • Commencer par demander au jeune ce qu’il connaît déjà sur le tabac et écouter son point de vue.
  • Proposer de compléter l’information dont il dispose en lui demandant son accord pour le faire. Un conseil ou une information se propose mais ne s’impose pas.
  • Solliciter sa réaction au conseil ou à l’information donnée: «qu’est-ce que tu en pense?».
  • Favoriser les échanges personnalisés afin d’entendre les motivations à ne pas fumer ou à fumer, ce que le jeune identifie comme avantages de la consommation (par ex. appartenir à un groupe, faire comme les autres, avoir du plaisir, se calmer, gérer ses problèmes, etc) et désavantages ou éléments négatifs.
  • Favoriser un court échange d’opinions plutôt qu’un long discours, et éviter les questions centrées sur la consommation elle-même (avec qui? quand? combien de fois?) qui pourraient être vécues comme un interrogatoire et rompre le dialogue.
  • Eviter de prendre la position de l’expert qui «sait» et ne pas lui parler comme à un enfant («ce n’est pas bon de fumer»).
  • Ecouter activement: lui montrer par des «mmhmm», «je vois…», «oui…», «vraiment?» que vous êtes concentré et intéressé par ce qu’il vous dit. Vérifier que vous avez bien compris en lui retournant le message avec vos propres mots.
  • Inviter le jeune à en dire davantage en utilisant des questions ouvertes et des réponses telles que «je suis intéressé par ton point de vue», «ça m’intéresserait d’en savoir davantage», «aimerais-tu en parler?», «vas-y je t’écoute», etc.
  • Eviter le jugement moral et ne pas critiquer la façon dont il voit les choses («tu es irresponsable de penser ça!»), mais plutôt accueillir son opinion et, ensuite, lui présenter la vôtre («Je pense que la cigarette est…»).
  • Parler en «je» («je m’inquiète pour toi…»), plutôt qu’en «tu» («tu me fais de la peine, tu me déçois…») qui est plutôt ressenti comme accusateur.
  • Rendre le jeune acteur. Par exemple, l’inviter à faire des recherches avec vous sur internet. Cette perspective s’inscrit davantage dans une démarche collaborative, plutôt que dans un schéma de communication à sens unique («tu reçois l’information que je te donne»).

Transmettre les messages clés

Il est important de parler de la dangerosité du tabac avec les jeunes. Mais, en matière de prévention, on sait que les jeunes sont généralement plus sensibles aux conséquences immédiates et sociales du tabagisme qu’aux risques à long terme pour leur santé. Voici alors quelques informations ciblées que vous pouvez transmettre aux jeunes:

  • «La majorité des jeunes ne fume pas.»

Environ 1 jeune sur 4, âgés de 15 à 19 ans, consomme du tabac. Les jeunes qui consomment du tabac ont, nettement plus souvent que les autres, des connaissances et des amis fumeurs: le milieu qui nous entoure influence nos représentations normatives et lorsqu’on évolue dans un groupe où la majorité de personnes sont dépendant-e-s à la cigarette, fumer semble la norme. Quand on leur pose la question, les jeunes ont souvent tendance à surévaluer la proportion des jeunes de leur âge qui fume; il est donc important de leur expliquer que fumer n’est pas la norme.

  • «Quelques cigarettes suffisent pour te rendre dépendant.»

Plus on  commence à fumer tôt, plus la dépendance s’installe vite. Le tabac agit sur ce qui est appelé «le circuit de la récompense» du cerveau. La nicotine est une substance psychoactive qui crée, grâce à son action sur le cerveau, une sensation de plaisir et de détente. Mais c’est aussi elle qui rend dépendant. Très vite, le fumeur ne peut plus s’en passer, il a besoin de quantités croissantes pour obtenir le même effet et les risques sur la santé s’accroissent.

  • «Fumer ne détend pas, c’est le manque de nicotine qui stresse.»

Beaucoup de jeunes considèrent que fumer aide à gérer les charges quotidiennes et à se déstresser. Or, il est important de noter que la nervosité est en réalité un des troubles causés par le manque de nicotine (symptôme de manque). Le cerveau, en manque de nicotine, envoie alors des signaux d’alerte (stress, agitation, nervosité, irritabilité, etc).

  • «Le tabac a des effets sur ton apparence.»

Le tabagisme entraîne des dommages touchant notamment la peau (moins bonne mine, teint gris) et les dents (jaunissement). Le tabac rend aussi les cheveux moins beaux. Fumer donne mauvaise haleine et l’odeur qui s’installe sur les cheveux et les habits est désagréable.

  • «Le tabac diminue tes performances sportives.»

La cigarette et le sport ne font pas bon ménage. Le tabagisme affecte principalement les systèmes respiratoire, cardiovasculaire et musculaire. En ce sens, il agit directement sur les performances sportives. Les fumeurs ressentent souvent une baisse des performances et sont plus rapidement essoufflés.

  • «Quel que soit le mode de consommation, le tabac est dangereux pour la santé.»

Le tabac peut être fumé, absorbé de manière orale ou prisé. Toutes les formes de tabac, entraînent une dépendance à la nicotine (substance présente naturellement dans la plante de tabac) et sont à l’origine de maladies et de décès.

  • «Fumer ruine ton porte-monnaie.»

coute_cherPour les jeunes, le coût financier est un argument de poids. En moyenne, une personne qui fume un paquet par jour devra consacrer un budget d’environ 250 francs par mois (soit par exemple le prix d’un abonnement de 6 mois avec accès illimité au cinéma) et plus de 3’000 francs par année (soit par exemple le prix d’un scooter).

  • «Les cigarettiers te ciblent et te manipulent.»

Les jeunes décodent les stratégies d’influence et craignent le fait d’être manipulés. C’est pourquoi leur expliquer comment les fabricants de tabac tentent à travers leurs stratégies marketing de les manipuler peut constituer un argument fort contre le tabagisme.

  • «Les règles et interdictions sont là pour te protéger.»

Le tabac étant un produit hautement toxique et présentant de nombreux risques pour la santé, mais malgré tout légal, les règles et les interdictions mises en place à son encontre servent à mieux protéger la population, et notamment la jeunesse. L’interdiction de fumer dans les lieux publics est par exemple utile pour aider à la débanalisation de la consommation de tabac. D’autre part, l’interdiction de vente aux jeunes de moins de 18 ans, en vigueur dans le canton de Vaud, permet, elle, de réduire l’accessibilité à des produits considérés comme dangereux.

Faire peur?

faire_peurDans le domaine de la prévention, l’utilisation de la peur (images «chocs», témoignages de malades, etc) peut être pertinente mais à certaines conditions :

  • L’individu ciblé doit se sentir concerné par cette menace («ça pourrait m’arriver») ;
  • Il doit avoir une solution efficace et facile à suivre pour l’éviter ;
  • Il doit se sentir capable d’appliquer cette solution.

Cependant, dans le domaine de la prévention du tabagisme auprès des jeunes, la menace (maladie) est perçue comme étant éloignée dans le temps. La solution proposée (non-entrée en consommation ou arrêt du tabac) n’est généralement pas évidente non plus. L’efficacité de ce type de stratégie est de ce fait loin d’être assurée. Il est donc préférable de renoncer à utiliser la peur lors du travail d’information et de sensibilisation auprès des jeunes.

Développer les compétences psychosociales des jeunes

Les compétences psychosociales sont des aptitudes personnelles et sociales qui permettent aux personnes de structurer leur identité, de faire face aux défis de la vie quotidienne et de développer leur pouvoir d’action.

Savoir prendre des décisions et résoudre des problèmes, avoir un esprit critique, savoir communiquer efficacement, savoir développer des relations positives et avoir de l’empathie, savoir gérer ses émotions et son stress : voilà quelques compétences psychosociales (CPS).

Renforcer ces compétences, c’est faire le pari que plus l’estime de soi est grande, mieux la personne réagira face à une situation difficile, en se mettant moins en danger.

Chez les enfants, le renforcement des CPS favorise le développement global (social, émotionnel, cognitif, physique), améliore les interactions et augmente le bien‑être. Chez les adolescents, outre les effets observés chez l’enfant, le développement des CPS permet de prévenir la consommation de substances psychoactives, y compris le tabagisme.

Dans le cas justement de la prévention du tabagisme, les professionnels encadrant des jeunes sont encouragés à mettre en place des interventions développant les compétences sociales (affirmation de soi, résolution de conflit, communication, compétences pour résister à la pression sociale), leurs capacités émotionnelles et cognitives (image de soi, gestion de l’anxiété et de la colère, prise de décision) ainsi que leurs connaissances des produits.

Le développement des CPS chez les enfants et les jeunes se fait principalement par la mise en place d’ateliers participatifs et expérientiels, à savoir: échanges, partages d’expériences, mises en situations, jeux de rôles, travaux pratiques sur les ressentis et les émotions, etc.

De manière générale, la meilleure façon de favoriser le développement des compétences psychosociales consiste à offrir aux jeunes un environnement qui les valorise en tant que personnes. En effet, être reconnu comme un sujet qui a une parole importante, dont la participation à un travail collectif est appréciée et à qui on reconnaît la capacité de prendre des décisions et de penser par soi-même, constitue déjà un terrain fertile pour l’épanouissement personnel. Dans cette perspective, une communication interpersonnelle basée sur les principes déjà mentionnés peut jouer un rôle fondamental.